Peter Sloterdijk
Je n’en parle pas souvent en classe parce que je n’aime pas trop coller aux actualités, mais j’aimerais tout de même déroger en votre compagnie à l’une de mes propres règles et prendre quelques courts moments sur le programme de cette année pour vous parler de l’auteur contemporain qui probablement m’a offert le plus de plaisir ces dernières années, et qui n’est autre que M. Peter Sloterdijk. Un Peter Sloterdijk qui me ravit d’autant que son dernier ouvrage traduit en français, La folie de Dieu, confirme cet extraordinaire pouvoir de séduction qu’ont ses mots sur mon humble statut de lecteur. M. Sloterdijk (on prononcera son nom d’origine néerlandaise correctement en disant bien « sloter-deille-k », « deille », comme dans bouteille, n’est-ce pas), qu’aucun sujet complexe ou profond ne semble intimider (non, Logan, Sloterdijk, ce n’est pas le Lucchini de la philo, rassieds-toi, s’il te plaît, merci), M. Sloterdijk, disais-je, est aussi un incroyable et singulier styliste, un philosophe écrivain, comme l’était en son temps Nietzsche, même si, parfois aussi, il se laisse envisager comme un écrivain-philosophe (comme l’étaient ces bons et lumineux Musil et Valéry, tout à fait Julie, très bonne remarque). Je ne peux donc que vous inviter à lire ce très beau et jouissif folie de Dieu, que pour ma part j’ai entamé en avion, par-dessus les nuages, accompagné bien entendu par la musique de M. Sloterdijk, mais aussi par une thématique on ne peu plus adéquate, topologiquement parlant, veux-je dire. Car, vous l’aurez deviné grâce à son simple titre, le dernier texte de M. Sloterdijk aborde les questions ô combien épineuses de la coexistence des monothéismes. Son aisance et sa volubilité, admirablement rendues par les traductions de M. Mannoni (M. Sloterdijk, grand francophile devant l’Eternel, doit sur ce point certainement lui être d’un très précieux secours) auront, j’en suis certain, tout pour vous séduire, mes chéris. Bien sûr, ce n’est peut-être pas aussi facile et frontal que ce qu’écrit M. Onfray (dont je sais très bien que vous cacher les lectures dans vos cartables, ne me prenez pas pour plus bête que je ne le suis !). On s’amusera par exemple, des précautions de M. Sloterdijk, assez inhabituelles chez lui, avancées dès le premier chapitre. Précautions d’usage puisque le sujet est plutôt brûlant, certes, mais néanmoins amusantes. Car il n’est pas courant de voir M. Sloterdijk ménager ainsi son lectorat ni le voir marcher sur des œufs ! Même lorsqu’il le fait à sa façon, c’est à dire tel un gaillard randonneur des Wandervogel, les combat shoes bien lacées, sourire et torse offerts au vent ! Lisez donc ce kunique amuseur et amusé, mes chéris, il vous inoculera les douces idées nocives qui ferons de vous de vrais et beaux… (je vous laisse terminer).